Chassez la PNL, elle revient au galop !

Il n’y a pas que mon épouse et mes enfants qui me lancent très souvent « arrête avec ta PNL », quand il me prend l’envie de les recadrer en leur posant une des fameuses questions du métamodèle. Vous les connaissez certainement, ces questions de recadrage qui font parfois désordre dans les réunions de service ou les repas de famille.

« Arrête avec ta PNL », c’est une phrase que je me dis aussi parfois quand je me surprends à décoder les comportements des personnes qui fréquentent la même salle de sport que moi. Une salle que j’ai  choisie pour sa proximité avec mon logement : il me faut à peine 5 minutes pour m’y rendre. Le prix a également joué un rôle dans mon choix. Je ne voulais pas d’une salle « snobinarde » avec bassin d’aquagym et aqua-biking et toute la panoplie pour attirer les travailleurs frontaliers du Luxembourg. Ah oui, il y avait également le fait que des douches étaient à la disposition des usagers. Des douches avec des robinets à pression. On appuie, on a un jet pendant 30 secondes ou peut-être un peu plus. Pour se rincer les cheveux ce n’est pas pratique du tout surtout quand on les a longs et touffus. Les miens sont courts et crépus, donc pas de problème pour les rincer. Bon, je crois que je m’égare. Revenons donc à nos moutons.

On trouve dans cette salle toutes les tranches d’âge. Tout le monde ne vient pas au même moment. Les retraités ou les personnes qui travaillent à leur compte et peuvent jouer sur leurs horaires,  viennent le matin à partir de 7h, parfois même plus tôt. Les jeunes parents viennent parfois le mercredi avec leur enfant qui n’est pas encore en âge de rester tout seul à la maison. Pour faire patienter le môme, on lui colle une tablette dans les mains. Les quadras se pointent entre 17h30 et 19h pour une heure de sport vite fait avant d’aller prendre leur part des préparatifs pour le repas du soir. Les jeunes adultes viennent plutôt le soir, vers 20h.

Il y a autant de comportements différents que d’usagers dans cette salle. Et le PNListe que je suis ne manque pas une occasion de faire le lien avec les différents métaprogrammes qui transparaissent dans ces comportements. Prenons par exemple Martine, une sénior qui doit se situer à mi-chemin entre soixante et soixante-dix ans. Elle fait partie d’un groupe dans lequel on retrouve Jean, Geneviève et Robert. Ils occupent tous les matins les chaises en plastique installées près de la machine à café et ils discutent. Ils parlent de tout et de rien. Martine est la plus assidue des quatre. Sa motivation pour venir à la salle serait dans le registre « s’éloigner de ». Elle passe beaucoup plus de temps à tailler une bavette avec ses camarades qu’à s’essouffler sur les machines de sport. Sa démarche à l’allure hésitante, penchée vers l’avant, ponctuée par des pas lourds pourrait faire croire à qui l’observe de loin qu’elle a des problèmes de santé ! Que nenni ! A en croire ses dires, elle se porte comme un charme. Elle raconte à qui veut l’entendre que cette salle de sport c’est comme sa seconde maison. Elle s’y repose de son lourdaud de mari qui ne décolle jamais « son gros derrière » (eh oui, c’est comme ça qu’elle parle de son mari) de son fauteuil alors qu’il ne souffre d’aucun handicap. Martine commence son entrainement par le tapis roulant sur lequel elle s’échauffe pendant une trentaine de minutes. Elle choisit toujours l’appareil qui se trouve à proximité de la porte d’entrée qu’elle surveille attentivement. Dès qu’une personne entre, elle lui lance un « bonjour monsieur » ou « bonjour madame » en pleine figure. Généralement, elle ne récolte qu’un sombre « ’jour » car à cette heure matinale, beaucoup de sportifs en herbe arrivent dans la salle pas encore complètement réveillés ! Mais il faut plus que cela pour décourager Martine. Elle observe les nouveaux arrivants. Elle les suit du regard jusqu’à leur installation sur une machine. Il lui arrive parfois de changer de tapis roulant pour mieux observer une personne qui vient de s’installer sur une machine de musculation. Et dès qu’elle aperçoit un usager en difficulté pour régler la bécane sur laquelle il veut travailler, Martine accourt pour lui venir en aide.  Eh oui, en cette heure matinale, le coach sportif de la salle n’est pas encore là. Et Martine se met à expliquer les réglages à sa façon, même sur les appareils qu’elle n’a jamais utilisés. N’aurait-elle pas une orientation de soi à autrui ? Et dès qu’une nouvelle personne arrive dans la salle, Martine est  déconcentrée. Elle continue ses explications tout en surveillant la nouvelle venue. C’est  généralement à ce moment-là que le sportif en rade de réglage la remercie pour se débrouiller tout seul. C’est déjà l’heure de la pause-café pour Martine et ses comparses. Il ne faut pas croire que tout le monde passe son temps à boire le café dans cette salle !  

Michel et Bernard arrivent toujours ensemble, autour de 8h. A croire qu’ils cohabitent. En réalité, ils n’habitent pas loin l’un de l’autre et se donnent rendez-vous au coin de la rue pour arriver de concert à la salle de sport. Michel avec son corps musclé et tonique fait beaucoup plus jeune que Bernard qui semble avoir du mal à porter sa soixantaine et son bedon. Je me demande lequel des deux est le plus lourd à porter. L’ironie du sort fait que Michel est déjà retraité – merci SNCF – alors que Bernard doit patienter encore deux années. Contrairement au groupe de Martine, ces deux-là ne passent pas beaucoup de temps au coin café. Ils se changent vite fait et s’installent sur les « vélos elliptiques » leur machine de prédilection ou sur « les vélos assis ». Dans tous les cas, ils font le tour des machines, côte à côte. Une chose caractérise Bernard et Michel : ils parlent tout le temps. Cela n’empêche pas Bernard d’allumer les écrans de télévision de la salle et de mettre le volume très fort. Ils adorent se disputer. Avec un côté  « mis-match » très accentué, Bernard a souvent le dernier mot. Chaque proposition, chaque phrase de Michel bute contre un « oui…mais » ou « ça dépend » de Bernard. Quel que soit le sujet. Ils prennent soin de faire profiter toute la salle de leurs discussions. Bernard s’amuse à prendre à témoin les autres usagers pour montrer qu’il a raison. Tout est passé à la moulinette: les « gilets jaunes », « le PSG », la manif des lycéens, la propreté des douches etc…  L’index de référence de Bernard est très facile à deviner. Toutes ses phrases commencent par « moi je ». Il généralise à fond sur tous les sujets et Michel tombe toujours dans le panneau. Presque toujours. Il gagnerait à apprendre quelques questions du métamodèle pour mettre à mal son comparse. Parfois, ils vont tellement loin dans la discussion que celui qui observe la scène  pourrait se dire : ces deux-là ne pourront plus jamais pratiquer ensemble.  Le lendemain, on les voit arriver presque bras dessus-dessous…avant de recommencer à s’étriller.

Ah j’allais oublier Pierre. Il s’appuie sur une canne pour marcher quand il arrive. Dès qu’il franchit la porte de la salle, il cale sa canne sous l’aisselle et se dirige vers les vestiaires, bon pied bon œil. A l’extérieur, il marche comme s’il était poussé dans le dos par une force invisible. Cette « poussée » l’oblige à s’arrêter à chaque pas pour rétablir son équilibre à l’aide de sa canne. Dans la salle, il retrouve ses ressources. Peut-être que cette salle de sport est son lieu-refuge, l’endroit où l’attend son réservoir de capacités ! En observant Pierre, je m’imagine un grand panneau lumineux qui serait accroché à l’entrée de cette salle : «  Vous avez en vous toutes les ressources dont vous avez besoin pour réussir votre séance de sport ». Et un autre «  N’oubliez pas de poser vos ancrages ».

Au fait, comment imaginez-vous une salle de sports pour PNListes ?

 

Eugène Mpundu, juin 2019

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